Fauteuils rouges

Joy Division (le documentaire)

Un petit bout de quelque chose dans ce documentaire sur un bref morceau de groupe. Sur Joy Division, "dernière vraie histoire pop", un film qui surprend par la valeur ajoutée et la véritable contribution au mythe tout en s’en détachant.


  Auteur: Charles M.     Date: 17/02/2009

 

Nous aimons souvent dire qu’une œuvre d’art est sans cesse en recomposition à travers l’interprétation du public, les critiques et les œuvres qu’elle inspire par la suite, ici c’est une réalité. Nous sommes très loin du simple biopic sur un groupe de rock ou sur une idole mythifiée. En effet, pas de noir et blanc peu convaincant comme dans un Control (film sur Ian Curtis sorti l’année passée), pas non plus d’interviews qui se déroulent chronologiquement à la No direction home (Dylan vu par Scorcese). Ici nous nous situons dans l’envie de faire l’expérience juste de ce qu’est un mythe artistique et musical, nous sommes dans le mécanisme de l’inspiration et de l’expiration. Grant Gee a senti son Joy Division, il l’a véritablement absorbé, et cette longue maturation a donné naissance à une vraie idée, celle d’une musique ambiante et inconsciente qui habite Manchester depuis hier jusqu’à aujourd’hui. Notre auteur veut montrer l’importance de la ville dans la production musicale de Joy Division, pour le faire, et à notre plus grand plaisir, on peut se délecter de superbes séquences filmées ou extraites de vieux documentaires. Le film ainsi bien ancré dans le mythe du groupe ne défraye pas la chronique, pourtant, il la dépasse. Nous sommes loin d’une acceptation sans réserve d’un mouvement de foule autour du jeune chanteur qui se suicide, nous sommes bien plus dans l’idée originale qui est la conséquence d’un groupe post/punk habité par ce "it" indéfinissable qui inspire ceux qui le sentent. C’est là que notre documentaire plaît, car si certains diront qu’il est mal habile ou peut maîtrisé, moi je trouve qu’au contraire c’est un documentaire très artistique qui compose à sa guise les éléments d’un groupe sur lequel tout a déjà été trop dit. Pour faire simple disons que le film ne se repose pas tranquillement sur l’idolâtrie, il fait plus, il se repose sur ce qu’il a senti du mythe, ce qu’il veut en retenir lui, et non pas ce qu’on peut en retenir globalement. C’est donc l’expression d’une sensibilité particulière autour de Joy Division et d’un Manchester de la fin des 70’s. Ainsi l’art est toujours au confluant d’un lieu, d’une époque et d’une rencontre : c’est ainsi que Joy Division a pu naître. C’est ainsi que Grant Gee a donné naissance ensuite à ce documentaire. A une époque où l’on recherche des fables, des idoles perdues dans le passé et des repères, il en a trouvé un : le plus beau des mythes comme la plus belles des illusions : celle qui ne dure pas.

 

“Il faut danser la vie” Nietzsche

"Au plus élevé trône du monde nous ne sommes encore assis que sur notre cul" Montaigne